Les vacances étaient encore loin pour le valkyrie, et s'il avait tout d'abord envisagé de les passer à se reposer, terré bien au chaud sous une couette dans son appartement, quelqu'un en avait décidé autrement. Il ne lui devait rien, n'avait rien à lui prouver et n'était même pas obligé de le prendre au mot, mais finalement cette idée de bénévolat l'avait séduit. Toutefois, il ne pouvait pas en faire sans se renseigner un minimum au préalable. Même si cette fichue tête de pioche lui avait donné quelques pistes, Luam avait décidé de se rendre sur le terrain pour y voir plus clair. Peut-être aussi un peu par orgueil, parce qu'on avait douté de ses propos lorsqu'il avait évoqué aller dans n'importe quel quartier de la ville. Il mentait régulièrement, mais certainement pas sur des futilités telles que celles-ci. Il n'y aurait personne pour confirmer sa présence, mais qu'importe, il n'y avait pas que ça. C'était dur d'admettre que ce type avait raison, mais c'était le cas. Qui mieux que les personnes vivant au sud pouvaient dire de quoi ils ou elles avaient le plus besoin en matière d'aide ? Vendu. Profitant d'un week-end un peu moins chargé que d'habitude, il s'était mis en tête de s'y rendre.

Luam avait passé plus d'une demi-heure devant sa penderie, ne sachant définitivement pas quoi enfiler pour ne pas être trop tape-à-l'œil. Il n'avait pas de fringues trop clinquantes, ça restait tout de même sobre, mais le côté luxueux ressortait au premier coup d'œil visiblement et ce n'était pas ce qu'il voulait. Comment pouvait-il être pris au sérieux en se ramenant habillé comme un prince ? Pestant un instant contre sa mère qui ne savait pas lui faire une garde-robe somme toute basique, il finit par opter pour un jean, un pull et un simple manteau noir. Il y allait en reconnaissance après tout, tant pis si ses habits n'étaient pas en adéquation. Puis, iels n'allaient pas cracher sur une main qui se tendait vers elleux. Il n'y avait que ce type qui remettait ses bonnes intentions en doute. Une fois arrivé aux abords de la ville, il fut étonné de voir autant de chevaliers. Soit sa mémoire lui faisait défaut, soit ils avaient gonflé les rangs et la raison, il le craignait, avait un rapport avec la multiplication des cristaux de fragmentum. Malheureusement, Luam ne pouvait rien faire pour ça. Glissant ses mains dans ses poches et enfouissant son menton dans le col de son manteau, il s’avança pour arriver jusqu'à la première habitation. Les passants le dévisageaient, du moins c'était ce dont il se persuadait alors qu’il n’en était peut-être rien. Mais il ne se laissait pas intimider et continuait son bout de chemin, tout en assimilant chaque petit détail.

Le nez en l’air, il se laissa surprendre lorsque quelqu’un tira sur un pan de son manteau. Portant son attention dessus, il remarqua la vieille dame en train de faire la manche. Pour une fois qu’il sortait avec de l’espèce sur lui, il n’hésita pas à en lui donner une partie. Un sourire en remerciement, Luam conclut leur échange silencieux de la même façon avant de reprendre sa marche. Mais il fut stoppé quelques pas plus loin par un gosse des rues, puis deux… et un troisième, pour finir par un beau petit attroupement autour de lui. Iels l’avaient vu donner et au vu de son allure, iels pensaient sans doute qu’il était un distributeur automatique. Il aimerait pouvoir donner à tous-tes, mais il n'avait pas autant sur lui et ne voulait pas avoir à faire de choix. Se faisant bousculer dans tous les sens, il manqua de tomber en se prenant les pieds dans ceux d’un gamin. Il se rattrapa à un bras tendu, celui-ci s’enroula au sien et le tira pour l’extirper de là. Relevant les yeux vers la personne qui l’aidait, il reconnut Elena. La voie libre, il reprit les devants et embarqua la jeune femme un peu plus loin. « Merci, ça allait tourner à l’émeute cette affaire. » Luam ne savait pas ce qu'elle faisait là, la dernière fois qu'il l'avait vu, elle partait pour un grand voyage. Toutefois, il n'était pas mécontent de cette rencontre. Ça faisait du bien de voir un visage familier, d'autant plus lorsqu'il était apprécié. « Tu es de retour à Sainte-Fontaine ? »

Retour. Elena n’avait pas prévu de revenir de sitôt à Sainte-Fontaine mais elle avait reçu un message énigmatique de son cadet. Ils étaient rares les échanges avec ses frères. Ils ne ressentaient pas le besoin de s’épancher sur leur vie respective mais le plus jeune avait toujours été le plus fragile donc elle ne pouvait l’ignorer. Peu soucieuse de tomber dans un traquenard, la blonde avait entamé le chemin inverse, alternant les moyens de locomotions.
Son arrivée par le sud fut marquée par la vision des cristaux qui s’amoncellent et grignotent toujours plus d’espace dans la ville. Ils étaient plus nombreux, plus gros, et elle savait qu’ils étaient loin d’être aussi inoffensifs que Schicksal le prétendait.
Durant ses stages de fin d'études au sein de l'hôpital de son père, Elena avait vu la souffrance et les différents maux qu'infligeait la maladie de l’honkaï sur les corps. Bien que l’on en taisait souvent l’origine, tout le monde savait et fermait les yeux.
Les premiers pavés avalés, elle se sentit immédiatement chez elle. Elena s’adaptait, se targuait de n'avoir aucune attache, mais invraisemblablement, elle entretenait un lien étroit avec la ville qui l’avait vue grandir.
Attroupement. Un chahut attira le regard de la belle. Il était grand, au moins deux têtes de plus qu’elle et trop propre sur lui pour être un résidant du coin. Luam. Ce n’était pas courant de voir un Apocalypse dans le coin, surtout risqué. La population du sud était affamée, fatiguée de devoir survivre plutôt que vivre, donc elle voyait d’un mauvais œil qu’un privilégié vienne se pavaner devant leurs yeux.
Il semblait ennuyé ainsi entouré, sa bonne âme se faisait tourmenter par de vilains gnomes. Sauvetage. Elle l’attira vers lui pour l’extraire de son bain de foule puis ce fut lui qui mena la danse.
ㅡ Tu cherches les problèmes en même temps. Tu pues l’argent à des kilomètres.
Il ne pouvait pas venir habillé comme Crésus et espérait passer inaperçu. Incompatible.
ㅡ Ce n’est pas définitif. Je viens m’assurer que tout va bien pour mon frère.
La raison donnée, il n’était pas nécessaire d’en dire plus. Elle trouvait son sujet à lui bien plus drôle a exploiter. Un sourire polisson sur le minois, curieuse de connaître la vérité.
ㅡ Alors c’est vrai ?
Loin de tout, Elena continuait à se tenir informée de ce qui se passait en ville et elle avait vu passer une information étrange dans les tabloïds. Un quiproquo pouvait arriver vite dans leur sphère, et elle savait que son ami n’était pas le genre à se donner en spectacle. Il lui semblait même que sa famille, au même titre que la sienne, était stricte sur certains sujets. Le sage Luam n’était clairement pas capable de tenir tête à son paternel, il le lui avait dit lui-même, donc elle était restée sceptique face à cet article. Mais le croiser ici remettait ses doutes en question.
ㅡ Tu sors vraiment avec un gars du sud ?

En venant dans le sud, Luam ne s’attendait pas à finir dans un bain de foule. Il était déjà venu à plusieurs reprises mais n’avait jamais pris le temps de vraiment déambuler dans les rues, trop pressé à courir entre deux rendez-vous. Il ne s'était donc pas attardé sur la population qui y habitait. Il savait que la pauvreté régnait en maîtresse, mais pas à ce point-là. Ce Neven avait sans doute raison, lorsque l'on habitait les beaux quartiers et que l'on n'avait jamais manqué de rien, on vivait avec des œillères qui nous rendaient immédiatement arrogants aux yeux des autres. Il ne voulait pas être comme ça et lui donner raison : il avait un cœur et éprouvait énormément d'empathie, suffisamment pour vouloir aider et faire en sorte que les inégalités s'estompent. Les enfants autour de lui étaient l'une des nombreuses preuves que les choses n'allaient pas.

Il était incapable de prendre une décision. Devait-il donner ce qui lui restait au risque de faire des jaloux, ou devait-il passer pour un égoïste et refermer son porte-monnaie ? La deuxième option était la plus judicieuse, mais le temps qu'il s'en rende compte, le cercle autour de lui avait pris de l'ampleur et certains chevaliers commençaient à regarder dans sa direction. Luam ne savait plus où donner de la tête lorsqu'une main l'attrapa et le hissa hors de la foule. Ses yeux cherchèrent le visage du ou de la responsable, et ses traits se détendirent en reconnaissant Elena. Il ne l'avait pas recroisée depuis qu'elle avait quitté la ville pour conquérir le monde. Il refusait de croire que son tour était déjà terminé et que le monde était si petit que ça, elle devait être de retour pour une bonne raison. S'il pouvait tout lâcher sans éprouver de remords pour en faire autant, il le ferait et ne reviendrait jamais. Enfin, c'était ce qu'il pensait, mais il aurait certainement bien du mal à s'en tenir à ce choix puisque ça voudrait dire qu'il laissait sa mère derrière lui. Visiblement, c'était aussi le cas pour la Seelie qui faisait un détour parce qu'elle s'inquiétait pour son frère.

Fronçant les sourcils à sa remarque, son regard coula sur ses propres vêtements. « Eh bien, je n'ai rien trouvé de mieux qui ne fasse pas ostentatoire. Rappelle-moi d'aller faire les boutiques avant de partir d'ici. » Il devait pouvoir se fondre dans la masse lors de sa prochaine visite dans le quartier. Luam releva la tête, un regard interrogateur sur le visage face à la question d’Elena. Qu'est-ce qui était vrai ? Elle devait comprendre à son expression qu'il ne savait pas où elle voulait en venir, puisqu'elle compléta sa question. Le valkyrie faillit s'étouffer en avalant sa salive de travers. Cette histoire lui collait au derrière malgré lui, ça en devenait pénible. « Quoi ? Bien sûr que non ! Il ne faut pas croire tout ce que racontent ces torchons. » Les joues rougies par l'embarras, il ressemblait plus à un petit garçon pris sur le fait qui essayait de trouver une excuse qu'à autre chose. Mais c'était vrai, il ne sortait avec personne et encore moins avec cette brute de Black Mamba. « De toute façon, je n'ai pas le temps pour ça » éluda-t-il en chassant l'image de Neven lui tirant la langue de sa tête.

Regardant vaguement autour de lui, ses yeux s'arrêtèrent sur les cristaux derrière la jeune femme. Qu'en était-il ailleurs ? Il n'avait jamais voyagé, donc il restait ignorant sur pas mal de choses. De plus, on ne parlait pas tant que ça du reste du monde dans les médias. Sainte-Fontaine et ses habitants avaient l'habitude d'être nombrilistes. « Comment c'est en dehors de Sainte-Fontaine ? Est-ce que c'est ravagé par l'Honkai ? Est-ce que tu as rencontré des monstres ? » Il était curieux, Luam, curieux de savoir si c'était toujours mieux ailleurs, comme le voulait l'expression ou s’il valait mieux se contenter de ce que l’on avait. Elena avait la chance de pouvoir répondre à cette question grâce à ses aventures. Peut-être y avait-il des villes au-delà de Mondstadt où il faisait bon vivre. Il avait déjà entendu parler de Poisson, mais il n'avait que des bribes d'informations à son sujet. La ville abritait une espèce, les Sluagh, dont l'Ordre de l'Apocalypse accusait d'être à l'origine de pas mal de maux. Il avait appris à leur contact que toute personne ne marchant pas dans leur conviction ou ne se conformant pas à leurs idéaux étaient des créatures du mal dont il fallait se débarrasser. Mais connaissant leur façon de faire, il se doutait bien qu'il s'agissait d'inepties.

Luam était un gentil garçon. Doux et soucieux de ce qui l'entourait. Donc elle n'était pas étonnée de le croiser dans un quartier où il était rare de voir un Valkyrie zoner. Il avait simplement oublié de se fondre à la masse afin de s'éviter des problèmes. Elena sourit en se souvenant du métier qu'exerçait la mère du jeune homme et doutait qu'elle accepte de voir son fils chéri se balader avec des vêtements de seconde main.
Cependant, la blonde trouvait l'image séduisante et l'exercice plutôt drôle.
ㅡ Je pourrais être ta Personal Shopper ?
Nouvelle résolution. Elena posait la question mais sa décision était prise et il n’avait pas d’autre choix que d’accepter. Elle n’avait pas prévu de rester en ville, juste le temps d’aller rendre visite à son petit frère le temps de s’assurer que tout était en ordre pour lui. Cependant, elle pouvait s’autoriser un petit encart pour un ami. De plus, il avait des choses à lui raconter. Curiosité. Elle devait avoir taper dans le mille vu sa réaction et même s’il niait, il y avait anguille sous roche. Qui rougissait de cette manière s’il n’avait rien à se reprocher ?
ㅡ Pourquoi t’as l’air aussi gêné, alors ?
Demanda-t-elle en s’approchant un peu plus de lui, les mains derrière le dos. Ses mirettes lorgnant les joues déjà bien rougies et essayant de voir derrière les mots. Elle était nulle pour faire des suppositions mais forte pour s’imaginer des choses.
ㅡ Bien sûr, monsieur le ministre.
Sourire coquin au creux de ses lips.
ㅡ  Tu ne sors pas avec… mais il te plaît, c’est ça ? J’ai raison, il te plaît ?
Yeux excités, trépignant sur place parce qu’elle aimait les ragots. Elle oubliait parfois qu’elle pouvait contrarier les autres en insistant sur des sujets, peut-être, privés.
Le sujet revenant sur elle et son voyage formateur, elle le regarda en arborant une mine pensive. Lors de ses différents trajets en dehors des villes, elle avait été étonnée de ne pas trouver un monde en complète friche. C'était moins pire que ce à quoi elle s'était préparée. Il y avait des horreurs, mais il pouvait aussi y avoir des paysages d’une beauté à couper le souffle. De même, elle avait rencontré des gens merveilleux, bien loin des soucis des grandes villes comme Sainte-Fontaine.
ㅡ Le mieux, c’est de venir voir par toi-même, mais tu dois être coincé ici avec ton boulot.
Elle aurait bien aimé l'emmener. Elle était persuadée que quiconque se devait d’entamer ce genre de voyage.
ㅡ J’ai croisé quelques monstres, mais la plupart avaient un visage humain. Mais, il y en a à certains endroits, là où les cristaux s’étendent le plus. La civilisation a déserté depuis longtemps généralement.
Sauf à Poisson. La surface était criblée de Fragmentum, et il n'était pas rare d’y croiser des monstres, mais tous avaient appris à vivre avec. Dans ce monde, il fallait s’adapter. C’était ça ou mourir.

Luam ne suivait pas la mode, il n’y connaissait rien et c’était même quelque chose qui lui passait au-dessus de la tête. S’il se fringuait ainsi, c’était parce qu’il n’avait rien d’autre dans ses placards et prenait généralement ce qui lui tombait sous la main. C'était faute à pas de chance s'il s'agissait toujours de pièces de créateur, d'autant plus qu'on lui avait affirmé que tout ne venait pas de marques de luxe donc il y avait bel et bien une part de hasard -ou pas-. Faire du shopping, se retrouver mêlé à la foule, devoir essayer dans des cabines minuscules, tout ça lui semblait être des choses déplaisantes pour lui. Fort heureusement, il y avait sa mère -la responsable- pour s’occuper de tout et il avait tendance à avoir une confiance aveugle en ses choix. Il s’évertuait seulement à paraître toujours bien apprêté, du genre tiré à quatre épingles typique des fils à papa modèles de bonne famille. Il ne lui manquait que la raie sur le côté et les cheveux plaqués pour que l’illusion soit parfaite. Donc, lorsqu’Elena se proposa de faire le boulot à sa place pour trouver des vêtements un peu plus passe-partout, il ne put qu’accepter l’offre. « T’es bien évidemment engagée » dit-il dans un sourire, visiblement aussi ravi qu’elle.

Cette offre n’était pas à effet immédiat évidemment, puisqu’ils avaient tous deux leur emploi du temps respectif pour la journée. Ce qui l’amena à se questionner sur la durée de son séjour ici, allait-elle rester quelques jours ou faire tout ce pour quoi elle était revenue, ajouter la séance de shopping et repartir illico presto ? Dans l’hypothèse où elle resterait, Luam se doutait bien qu’elle serait réticente à loger dans sa demeure familiale, au risque de ne plus pouvoir repartir. Voilà pourquoi il anticipa le problème : « J’imagine que tu vas éviter de mettre un pied chez toi donc si tu ne sais pas où dormir, tu es la bienvenue chez moi. Tu n’auras qu’à m’envoyer un message et je te passerai mon adresse et le code de la porte. » Et puis, il n’était pas contre un peu de présence chez lui, ça animerait ses soirées et briserait sa routine.

Mais alors qu’il se montrait altruiste et se réjouissait à l’idée d’avoir une colocataire, même l’espace d’une nuit, celle-ci lui fit presque regretter sa proposition. Pourquoi ramènerait-elle de mauvais souvenirs à la surface ? Il voulait que ce fichu article soit brûlé, enterré, qu’importe mais un lointain souvenir ou qu’il n’ait jamais existé. Puis, il ne voulait pas avoir à parler de cette brute de Black Mamba. « Je ne suis pas gêné » rétorqua-t-il, les sourcils froncés. Il était plus ennuyé que gêné, parce que ça avait causé pas mal de tort. L’autre s’en tirait plutôt bien puisqu’il restait un anonyme et c’était mieux ainsi, au vu de la scène qu’il lui avait faite pour une seule photo. Mais plus il y pensait et moins il lui en voulait, rejetant la faute sur sa propre personne. Le Valkyrie roula des yeux en entendant son sarcasme. Il n’avait pas le temps ni la place pour accueillir quelqu’un dans sa vie et il espérait que la personne, quand le bon moment sera venu, ne sera affiliée à aucune organisation de malfrats. Et ne lui parlera pas en lui aboyant dessus, très important ! Il ne put néanmoins se retenir de piquer un fard face à son insistance pour savoir s’il lui plaisait ou pas. « Certainement pas ! Il est …. exécrable » Évitant de juger uniquement sur un point de vue physique, parce que s’il avouait qu’il le trouvait plutôt mignon, ça serait la fin pour lui. Elena n’allait pas le lâcher et vraiment, il ne tenait pas à parler de ce Neven encore longtemps.

Il en profita pour changer de sujet, demandant comment était l’extérieur. Luam n’avait pas le loisir de quitter Sainte-Fontaine, son éternelle cage dorée. Il avait poussé qu’une seule fois jusqu’à Mondstadt, mais c’était tout, il n’était jamais allé plus loin donc il était plutôt curieux. « J’aimerais bien, ne me tente pas. » Il avait du boulot certes, mais il avait aussi des périodes de congés. Il pouvait bien les scinder en deux, consacrer le début au bénévolat et la fin à une petite expédition. « À vrai dire, j’ai bientôt des vacances. Je pourrais t’accompagner quelques jours, je veux voir autre chose que ce que je connais déjà. Peut-être que ça changera ma perception de certaines choses et que j’en tirerai des conclusions bénéfiques. On m’a tellement bourré le crâne que j’aimerais mieux me faire ma propre opinion. »  Depuis petit, Luam avait toujours ressenti le besoin de voir les choses de ses propres yeux pour y croire. Cette façon de penser lui avait valu de nombreuses punitions : c'était mal de remettre en question ce qu'on lui racontait. Peut-être que sa crédulité maladive était un vestige de cette époque. Il gobait les informations sans savoir réellement si elles étaient véridiques ou non, parce que c'était ce dont on avait toujours attendu de lui. Cependant, dans ce cas-là, il était prêt à passer outre et Elena allait l’aider.

Elena sourit à son tour et lui tendit sa main pour sceller leur accord sur cette séance de shopping. Ça l’obligeait à rester un peu plus longtemps en ville, mais elle ne voyait pas cela comme une contrainte. Elle se réjouissait de passer du temps avec un ami pour une fois, plutôt que de devoir se faire une place parmi une foule d'inconnus. De plus, il lui coupa l'herbe sous le pied en lui proposant de venir chez lui.
Il était clair pour elle qu’elle ne devait pas remettre un pied chez les Gunnhildr, c’était beaucoup trop tôt. Elle avait trouvé l’audace et le courage de partir, donc cela ruinerait tous les efforts qu’elle avait accomplis pour gagner sa liberté.
ㅡ Je n’y manquerai pas
La blonde se sentait un peu plus sereine en sachant où elle allait loger ce soir-là et, pour montrer sa reconnaissance, elle enlaça le jeune homme.
ㅡ Merci. J’apporterai des collations. J’espère que tu aimes les pop-corn au caramel ?
Tout le monde aimait ça de toute façon.
Relâchant son étreinte, elle planta son regard améthyste dans celui, ébène, de Luam. Elle se rappela de l’article qu’elle avait lu à son propos et le taquina un peu à ce sujet. À l’évocation du supposé petit-ami, les joues de son ami s’enflammèrent. Cette réaction montrait qu’il y avait anguille sous roche.
ㅡ Exécrable… hmm vraiment
Rictus. Elena n’insista pas davantage, mais elle gardait cela sous le coude et réattaquerait lors de leur soirée.
Le sujet changea complètement pour se poser sur son voyage. C’était difficile de raconter, plus simple s’il pouvait voir de ses propres yeux. Voilà pourquoi elle lança l’idée qu’il la suive un jour. Il n’avait pas l’air contre, même plutôt pour. Sourire.
ㅡ Cap ! Pendant tes vacances, je t'emmène explorer le monde. On ira jusqu'à Poisson, une petite ville qui m'a vraiment marqué. J'ai eu un véritable coup de cœur pour cet endroit et les habitants sont vraiment formidables et courageux. L'atmosphère y est tellement différente d'ici, j'ai l'impression qu'ils comprennent mieux la solidarité.
Son amour pour cette ville transparaissait dans son intonation en en parlant. Connaissant le jeune Apocalypse, elle savait déjà qu'il apprécierait autant les lieux qu'elle. Un cœur pur ne pouvait qu'être en harmonie là-bas. Elena regarda sa montre, l'heure tournait. Ses yeux balayèrent autour d'elle et repérèrent le groupe de gamins non loin. Interrogation. Si Luam n'avait effectivement pas de petit-ami dans le coin, alors que faisait-il ici ?
ㅡ Du coup, quelle est la raison de ta présence ici ? Si ce n'est pas urgent, je te conseille de revenir plus tard. Les gosses vont revenir te faire les poches.
Elle pointa du doigt l'amas de gamins.
ㅡ Et les gardes n'apprécient pas trop l'agitation. C'est toi qui risquerais de te faire embarquer.

Luam était heureux de pouvoir aider son amie et n’attendait rien en retour, si ce n’était de passer une soirée agréable en sa compagnie. Sur la voie de l’harmonie, le Valkyrie arrivait à s’entendre avec n’importe qui, il était facile à vivre et passait généralement les besoins des autres avant les siens. Cependant, malgré cette facilité à échanger avec autrui, il ne comptait que peu d’amis dans ses contacts. Son enfance isolée à cause de l’Ordre ne lui avait pas permis d’en avoir beaucoup, les seuls autres gamins qu’il avait rencontrés étaient ceux des autres familles descendantes de l’Apocalypse et il ne s’y était pas lié plus que ça. Elena était l’exception, parce qu’ils partageaient pas mal de points communs.

Malgré l’affinité certaine qu’il éprouvait à son égard, Luam se retrouvait toujours très mal à l’aise lorsqu’on lui témoignait un peu trop d’affection. Il n’était pas tactile et ne savait généralement pas comment se comporter face à une étreinte. Où placer ses mains, quelle force y mettre, et il se retrouvait bête, les bras ballants à prier pour que ce supplice termine rapidement. Mais, ne voulant pas que sa réaction soit mal interprétée par Elena, il se contenta d'un léger tapotement dans le haut de son dos. C'était juste inconfortable pour lui et ne remettait en aucun cas l'affection qu'il avait pour elle. « Oui, j’aime ça » C’était le genre de friandises qu’il mangeait quand il se terrait chez lui après avoir trop sociabilisé ou quand il subissait une petite baisse de morale. Le sucre faisait du bien, réconfortait les petits tracas même s’il ne les résolvait pas.

Après s’être mis d’accord et avoir survécu au câlin, Luam se retrouva de nouveau acculé face à la curiosité d’Elena. Décidément, elle avait le chic pour l’embarrasser. Ce n’était pas fait dans un but malveillant, il savait que la jeune femme était d’une nature indiscrète. Elle aimait les ragots et ce devait être d’autant plus intriguant qu’il en fasse partie. C’était qu’il n’avait jamais fait de vagues auparavant, personne n’avait jamais entendu parler de lui dans la presse pour une histoire comme celle-ci, donc il ne pouvait pas lui en vouloir. Sous-entendant que sa rencontre avec le type de l’article était un mauvais souvenir à cause de son attitude exécrable, il réussit à la faire passer à autre chose. Cependant, il savait bien que ce n’était que partie remise et qu’il passerait sous les feux du gril bien assez tôt.

Elena parla ensuite de Poisson. De toute les villes, cette dernière était celle qui l’intriguait le plus. Pour avoir entendu certaines choses sur ses habitants, mais aussi parce qu’elle lui semblait si loin de ce qu’il connaissait que ça ressemblait à une chimère pour lui. De ce qu’il savait, des cristaux envahissaient presque la majorité de l’endroit et même s’il avait plus de résistance que la plupart des gens face au fragmentum, il préférait s’en tenir loin car ça lui rappelait sans cesse que c’était la cause de la disparition de sa demi-sœur. « Je viendrais avec toi pour voir ça de mes propres yeux » affirma-t-il en souriant. Puis son regard suivit celui de la blonde. Ah, les gosses étaient de retour dans les parages. Ça allait effectivement être compliqué de finir sa prospection tranquillement. « J’envisage de faire du bénévolat dans le sud. » avoua-t-il de manière honnête. Il se retint néanmoins de dire que l’idée lui avait été suggérée, il ne souhaitait pas faire face à une nouvelle salve de questions. « Donc je venais voir ce qui serait le plus judicieux et utile pour aider convenablement les habitants du quartier. » Grimaçant en entendant la fin de sa phrase, il ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle avait raison. Visiblement, sa présence troublait la quiétude des lieux et un attroupement pouvait vite dégénérer. On ne pouvait blâmer des enfants, mais un adulte, si. Luam ne tenait pas à faire de nouveau la une des médias parce qu’il s’était fait embarquer pour trouble.

Jetant un œil aux chevaliers du coin, il soupira, comme résigné. « T’as raison. Faudra que je revienne avec ma nouvelle garde-robe » Mais la présence de toutes ces personnes en uniforme prouvait une fois de plus qu'il y avait bel et bien un problème dans ce quartier. Les cristaux n'étaient pas seuls responsables, les monstres de l'Apocalypse non plus, mais le risque était beaucoup plus élevé que dans d'autres quartiers. Seulement, même s'il mettait le doigt sur ce problème, Luam se sentait un peu désarmé. Il était incapable d'aider pour ça et un sentiment d'impuissance l'envahissait à mesure qu'il s'en rendait compte. Tant pis, il aiderait sur d'autres choses, comme réhabiliter certains lieux, ouvrir une cantine solidaire, ou faire en sorte que les enfants puissent suivre une scolarité. Il y avait tellement de choses à faire. Voyant Elena regarder sa montre, il comprit que le rendez-vous avec son frère devait pas tarder à arriver. Il sourit, puis planta ses mains dans ses poches. « Je ne vais pas te retenir plus longtemps. Je te dis à ce soir » Prenant son portable, il envoya rapidement son adresse ainsi que le code de sa porte pour ne pas oublier. Il lui adressa un petit signe de la main avant de se retourner et prendre la direction des chevaliers, histoire de pouvoir partir tranquillement et garder les gosses à distance.  

Elle était ravie de savoir que son ami l’accompagnerait dans l’une de ses excursions. C’était une promesse de bons moments pour elle. La solitude ne la dérangeait pas, mais il était toujours plus agréable de découvrir les choses à deux ou à plusieurs. Elle aimait pouvoir partager et échanger sur ses ressentis.
ㅡ  J’ai tellement hâte !
Elena avait du mal à tenir en place maintenant qu’elle savait qu'il viendrait. Mais la gamine excitée en elle se calma rapidement en apercevant le banc de marmots non loin. Elle ne voulait pas les attirer de nouveau. Ce qui la poussa à se questionner sur la présence de Luam dans les quartiers Sud.
ㅡ Oh, je vois.
Ça ne l’étonnait pas d’entendre qu'il voulait faire du bénévolat. Il était dans son élément quand il faisait le bien autour de lui. Elena appréciait vraiment l’altruisme dont il faisait preuve et ne doutait pas du fait qu’il en ferait de même lors de leur expédition. Il aurait certainement ce sentiment d’impuissance qu’elle ressentait parfois en voyant la misère de certaines personnes. Elena avait du mal à se dire qu’elle ne pouvait pas venir en aide à tout le monde, mais c’était ainsi. Elle savait qu’elle faisait son maximum et ça suffisait à ne pas perdre le moral.
ㅡ T’as toujours eu bon cœur.
Yeux et sourire mutins. Elena hésita à en remettre une couche, et pas du genre à se retenir habituellement, elle soupira et prit un air ennuyé.
ㅡ T’es l’homme idéal, il en a de la chance ce petit-copain.
Elena lui pinça la joue avant de s’éloigner d’un pas. Son portable entre les mains, elle vit la petite enveloppe s’afficher sur l’écran, signe qu’elle avait bien reçu le message de Luam.
ㅡ Reçu ! Merci.
Pour confirmer, elle lui montra l’écran, puis lorsqu'il s’éloigna, elle l’imita. Prenant la direction opposée, elle accéléra le pas pour ne pas trop faire attendre son frangin.